Culture

Froid, le Maroc

© D.R

La vague de froid qui tient le Maroc sous les couvertures est l’événement qui alimente toutes les conversations depuis quelques jours déjà. Les chauffeurs de taxi casablancais ont enfin trouvé un sujet qui fédère tous leurs clients. Du spectre de la sécheresse qui guette l’année agricole, aux méfaits du Tsunami et au réchauffement planétaire, Tout y passe.
La conversation ramène aussi évidement le tout à la volonté Divine. Certains y voient bien sûr un signe de mécontentement Divin, mais demeure confiant quant aux leçons que les humains ne manqueront pas de tirer de ces signes d’alarme. D’autres attribuent le phénomène à une approche inéluctable d’un déluge planétaire qui achèvera par tout emporter. Une sorte de Tsunami géant qui prépare la fin du monde. Mais au-delà de l’appréciation des uns et des autres de cette vague de froid, il n’en demeure pas moins que le phénomène est assez préoccupant. C’est apparemment un signe d’une réelle perturbation climatique qui ne manquera pas de transformer des habitudes de vie séculaires. Le Maroc, tout comme l’Algérie ou la Tunisie, ses voisins du Maghreb, est en phase de s’installer dans une zone de turbulence qui, dit-on, risque de changer à la longue le climat durant la période de l’hiver. Si la pluviométrie et depuis quelques années déjà un souci saisonnier, il faut prendre en considération le refroidissement qui s’abat de plus en plus sur cette partie du pourtour méditerranéen. Il est certain que des températures qui flirtent au-delà de la barre limite du zéro fatidique ne sont pas des températures habituelles à un pays plutôt fier de ses 365 jours de soleil chaleureux et réchauffant, comme le voudraient les slogans touristiques de charme. Il est clair que les Marocains, dans leur grande majorité, ne sont pas confortablement équipés pour supporter des hivers aussi sévères. En fait, ni les habitudes vestimentaires ni la vie de tous les jours ne permettent de faire face à ces températures, vécues comme une véritable souffrance par tous. Si la notion de chauffage centrale domestique pouvait faire sourire les architectes et les promoteurs immobiliers il y quelques années à peine, elle est de plus en plus d’actualités.
En tout cas, elle devrait l’être. Dans le vaste chantier de construction des ensembles immobiliers, notamment dans les grandes villes, cet élément n’est jamais pris en considération. Le soleil étant une richesse nationale, la simple évocation de la présence d’un dispositif central de chauffage dans une résidence, même de haut de gamme, pouvait paraître saugrenue.
La conception architecturale de luxe pouvait, tout au plus prévoir la présence d’une cheminée, plus considérée comme un signe de richesse que comme un moyen pour chauffer les intérieurs. Mais les derniers hivers tendent à prouver que le froid est dorénavant un fait qui s’installe durant toute la période hivernale pour étendre son spectre sur l’ensemble du territoire national. Cela suppose la mise en place de toute une série de stratégies pour améliorer la qualité de la vie du citoyen. Et cela ne relève pas de l’impossible. Car le confort domestique des ménages marocains est réellement mis à mal. On se débrouille comme on peut pour se chauffer et réchauffer l’ambiance familiale, prenant parfois des risques importants. Entre kanouns traditionnels, chauffage électrique ou à gaz, les recettes dépendent des moyens et des disponibilités. Et les moyens n’existent pas ou alors très peu. Ceux qui ne disposent de rien, c’est-à-dire une grande majorité de Marocains, passent leur week-ends et soirées sous les couvertures. Dans les bureaux, les fonctionnaires gèlent et passent leur temps à rêver de l’instant ou ils se remettront sous leurs couvertures. Ceci a évidemment aussi des conséquences économiques.
Les gros pulls, les doudounes, les manteaux, les gants et les chaussettes se vendent comme des petits pains, notamment dans les marchés aux puces. Les grandes surfaces et les magasins d’électroménagers écoulent joyeusement leur stock d’appareils de chauffage. Les marchands de charbon traditionnel ont sensiblement augmenté leur prix. Bref, le Maroc se débrouille comme il peut pour ne pas geler. C’est vrai aussi que cela ne manque pas d’exotisme et de charme. Les gamins de Khémisset, de Midelt ou d’Oujda ont savouré cette neige dont beaucoup n’avaient jamais vu la couleur. Ils ont même osé le fameux bonhomme des neiges dans la joie et l’allégresse.
De nombreuses familles, profitant de la période des vacances scolaires, se sont ruées vers les stations de ski pour apprécier la couleur transparente de la belle poudreuse. Censé être un voyage de découverte, l’escapade s’est souvent transformée en véritable expédition. Non seulement, on a dans plusieurs cas sous-estimé la portée du froid, mais il a fallu faire face aux nombreux dangers que les routes, mal équipées, représentent. La fragilité de toute l’infrastructure est ainsi mise à nu et risque à la longue d’influer sur tout un mode de vie. Mais le froid et la neige ne sont pas simplement un handicap ou une fatalité. Cela peut même être un moteur pour drainer toute une catégorie de touristes qui ne figurent pas encore comme cible pour les promoteurs touristiques. Des dizaines de milliers d’Européens sont en quête de stations de skis abordables, de ballades dans les sommets enneigés, de gîtes montagnards excentriques et d’ambiances rustiques. Un créneau qui pourrait être exploité à l’horizon 2010. Une manière intelligente pour étendre la perspective des dix millions de touristes attendus.

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