L’avenir d’Air Horizons est compromis. La compagnie charter française a finalement déposé le bilan, dans l’après-midi du 14 novembre 2005 au tribunal de Commerce de Bobigny. Les juges français devaient se réunir aujourd’hui-même à partir de 9 heures, pour décider du sort de cette enseigne introduite au Maroc en janvier 2004, à la faveur des programmes d’encouragements menés tambour battant par les ministères du Transport et du Tourisme.
Deux options sont possibles désormais pour Air Horizons : l’officialisation de la procédure de dépôt de bilan ou la continuation des activités par voie de redressement judiciaire. Mais les événements se précipitent.
Quelques heures après que l’information soit rendue publique, les différents fournisseurs essayaient de faire prévaloir leurs intérêts. Vu le risque d’insolvabilité financière de Air Horizons, les services handling de Royal Air Maroc ont refusé de traiter, sans être payés à l’avance deux avions de la compagnie à l’aéroport Mohammed V de Casablanca et à Agadir Al Massira.
Plusieurs personnes dont le consul de France sont intervenues pour débloquer la situation à Agadir. A Casablanca, les services du ministre du Transport, Karim Ghellab, ont essayé aussi d’arranger les choses. Les passagers, français pour la plupart, se retrouvent pris au piège, 24 heures à peine avant la visite prévue de Dominique de Villepin.
La Royal Air Maroc explique le recours à de tels procédés par le souci de préserver ses intérêts. «Air Horizons a remis aux services de la compagnie nationale un chèque sans provisions d’un montant de 285 000 euros, en règlement de services d’assistance aéroportuaire», annonce un communiqué de la RAM.
Pendant ce temps, à la Direction d’Air Horizons à Casablanca, c’est motus et bouche cousue. Pas de commentaire même si dans les parages de la représentation commerciale on confirme le dépôt de bilan. «Nous n’avons aucune instruction particulière. Notre souci premier est de faire voyager les passagers qui ont acheté les billets. Nous ferons le maximum», indique-t-on sans plus de commentaire.
L’inquiétude est aussi grande chez les autres fournisseurs marocains de la compagnie Air Horizons. L’Office national des aéroports qui n’a peut-être pas les mêmes moyens de faire prévaloir ses intérêts comme l’a fait la Royal Air Maroc serait aussi victime de quelques impayés avec Air Horizons. Même déconvenue pour la compagnie Star Aviation qui réclame à la compagnie charter française des impayés dépassant largement les 2 millions de dirhams. Là aussi, une reconnaissance de dette avait été signée, une procédure de paiement par tranches trouvée. Mais les responsables d’Air Horizons ont fait-faux bond en ne se présentant pas lors du premier règlement, le 17 octobre dernier.
Faute de ne réclamer en règle générale que des cautions couvrant à peine 15 jours, les fournisseurs devront désormais s’en remettre aux décisions des tribunaux pour récupérer leur dû. Vu les longues procédures qui suivent un dépôt de bilan et le caractère suspensif qu’offre le redressement judiciaire, ce ne sera pas pour demain.
En attendant, la licence du régulier que la compagnie – pourtant en difficulté- avait obtenue des autorités marocaines aiguise tous les appétits. Qui en sera l’heureux acquéreur ? Les spéculations sont nombreuses. Aigle Azur et Air Méditerranée seraient dans les rangs. Star Aviation qui menace de saisir le fonds de commerce de la compagnie française se refuse à tout commentaire.
Mais à la longue, c’est Star Air Line qui, comme Air Horizons, appartient aussi à l’ancien député égyptien, Raymond Lakah, que devrait revenir l’autorisation. Signe annonciateur de cette éventualité, hier 15 novembre, c’est un avion de Star Air Line qui devait atterrir à Fès en lieu et place d’un vol normalement programmé pour Air Horizons. Un échange commode qui permet d’éviter d’éventuels problèmes de saisie.
Si Star Air Line remplaçait Air Horizons, Raymond Lakah sera alors assuré de continuer à faire de belles affaires au Maroc. Lui qui a repris l’agence Safars Tours (spécialiste des MRE), brûlant la politesse à la RAM pour la deuxième fois, et qui, alors que Air Horizons menaçait ruine, a racheté les parts de Cedric Pastours (Look Voyages, partenaire de la CDG à Marrakech) dans Star Air Line. Le ministère du Transport aura joué le rôle du blaireau en déroulant devant les pieds du franco-égyptien une belle licence du régulier qui permet de desservir Casablanca et Rabat.