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Éditorial : le lobby de l’amont

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Le gouvernement compte signer au cours du mois de Ramadan un nouveau contrat-programme avec l’Association marocaine de l’industrie du textile et de l’habillement (Amith). Le premier, signé sous le cabinet Youssoufi en août 2000, a permis au secteur d’arracher au nom de la compétitivité des réductions de charges sociales et du coût de l’électricité en échange de la création de plusieurs milliers de postes d’emplois et de formation de la main-d’œuvre. Ces engagements n’ont pas été respectés par les bénéficiaires. Bien au contraire. Le démantèlement des accords multifibre (AMF) le 1er janvier 2005 a accentué la crise de la filière, agissant en fait comme un révélateur de ses multiples insuffisances. Cependant, nul ne sait dans quelle mesure l’agitation permanente de certains bonnets de l’Amith est représentative de la situation réelle de cette industrie. Une chose est sûre: ceux qui  montaient jusqu’ici au créneau en interpellant crânement les pouvoirs publics oeuvrent tous dans l’amont du textile, à savoir la filature. Agissant comme un lobby puissant, les opérateurs de ce créneau ont pris l’habitude de réclamer, comme si c’était un droit, les mêmes réductions -qui s’apparentent en fait à des avantages -censées améliorer la compétitivité des entreprises du secteur. Ce n’est pas un hasard si les revendications qui reviennent comme une litanie portent souvent sur la baisse du coût de l’énergie qui est très consommée par la filature.
C’est ainsi que les gouvernements qui se sont succédé n’ont réussi en fait qu’à protéger l’amont et ses acteurs au lieu de l’ouvrir à la concurrence. De fil en aiguille, les réclamations d’un seul lobby sont devenues celles de l’ensemble des branches de l’activité. Or, les problèmes des différentes composantes de cette dernière ne sont pas du tout les mêmes. Un fabricant de chemises ou de pantalons, par exemple, ne doit pas logiquement réclamer l’accès à l’électricité au moindre prix car celle-ci ne pèse pas lourd dans les coûts de production. Il serait légitime par contre qu’il se bagarre pour l’accès à la matière première sur le marché international à des conditions avantageuses. Mais ce type de discours n’a jamais été tenu. 
Il est donc permis de penser  fortement que ceux qui parlent bruyamment au nom du secteur du textile-habillement ont défendu un tissu de revendications corporatistes taillées sur mesure. La preuve que l’industrie concernée est encore attrayante au Maroc, l’installation de trois grands groupes étrangers à un moment où les entreprises nationales crient au marasme.
Le projet du deuxième contrat-programme dit de relance doit être novateur, juste et objectif. Il va falloir en finir avec l’esprit de rente, séparer le bon coton du mauvais et tenir compte des vrais besoins de la filière. Une filière qu’il s’agit de recentrer sur les créneaux où le pays a vraiment des avantages comparatifs par rapport à la concurrence.

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