Depuis que la grippe aviaire monopolise les médias du monde entier, mais aussi l’agenda des dirigeants, au plus haut niveau, de plusieurs pays, les responsables du dossier au Maroc ont opté pour une autre approche. Ministres, mais aussi hauts responsables de divers départements et organismes, montent au créneau pour répéter une seule phrase : le Maroc ne recense aucun cas de grippe aviaire, le Maroc "indemne"… A tel point qu’on croirait à quelque contamination par le "syndrome" qui a rendu célèbre le fameux "Mister No". Que cela soit effectivement le cas au Maroc, on ne demande pas mieux. Sauf qu’un citoyen rassuré-convaincu vaut mieux qu’un citoyen bombardé par des dénégations à n’en plus finir. Et c’est tout. Car, ne pouvant accuser tout de même les responsables de mauvaise foi, il y a une sorte de malaise qui doit être dissipé. L’exemple le plus significatif est ce feuilleton où des oiseaux, par paquets de plusieurs dizaines et dans plusieurs localités, ont convenu soudain de dire adieu à ce bas monde. Quelle en est la cause ? On ne le sait pas et on ne le saura pas si ce dossier continue à être géré de la sorte. Pour toute réponse, on a droit au célèbre "le Maroc est indemne". Mobilisation, il y en a comme en témoignent les interminables réunions autour d’un plan de riposte qui n’en finit pas d’être mis à jour. Sauf que l’on ne la sent pas dans les faits, cette mobilisation. Comment, dans ce cas, compter sur l’adhésion de larges franges de citoyens ? Difficile de le faire sur parole.
Mais il y a aussi cette histoire du laboratoire londonien auquel tous les pays européens recourent pour leurs analyses. Au Maroc, l’on nous affirme que ces analyses sont effectuées localement. Doit-on alors en conclure que l’on est vraiment à la pointe en ce qui concerne ce volet ? C’est un pas difficile à franchir, en toute logique. Et puis où il est, si tout va bien, cet effort – nécessaire – d’explication ? Manière d’expliciter, par exemple, au grand public les différentes étapes de l’évolution de la maladie ou alors la différence entre le virus qui décime les oiseaux et l’étape, critique, où la transmission se fait d’homme à homme. On n’a pas encore vu un responsable local, à Rabat ou à Casablanca par exemple, venir nous dire si les nuées de pigeons hantant ciel et artères ne représentent pas de danger dans la conjoncture actuelle. Ou alors le scénario prévu dans ce sens au cas où l’inévitable arriverait à se produire.
Un travail d’explication nécessaire ne serait-ce que pour sauver un secteur qui trinque, des dizaines de milliers d’emplois qui risquent d’être perdus avec les répercussions sociales et économiques que l’on peut deviner. Aux dernières nouvelles, il était question de la création de comités locaux du plan de riposte national. Que font-ils sur le terrain ? On ne le sait pas non plus. Rassurer, c’est une bonne chose. Le faire avec la manière et convaincre, c’est encore mieux, Car, en définitive, rien ne vaut un coquelet au thym, dévoré la conscience tranquille.