Le trafic de drogue à partir du Maroc à destination de l’Europe, sans être véritablement une question d’actualité, est revenu au devant de la scène. Même si, modestie oblige, on est loin des communiqués triomphants de la campagne d’assainissement de 1996.
Ce fut d’abord, au début du mois, l’affaire de la jeune Sénégalaise (23 ans), N’Diaye Amboise Mireille, arrêtée le 11 décembre 2001 à l’aéroport international Mohammed V alors qu’elle portait dans son sac, plus d’un kilo et demi de cocaïne d’une valeur estimée par les services de douane à plus de 231 millions de centimes.
La ressortissante sénégalaise avait été chargée par des Nigérians de récupérer ce chargement à Caracas (Venezuela) et le convoyer jusqu’à Bamako, là où il devait être réceptionné par un individu, moyennant une somme de 3500 dollars, sur laquelle elle avait touché un acompte de 1000 dollars.
Obligée de transiter par Casablanca, la jeune Sénégalaise a été arrêtée par les douaniers à l’aéroport Mohammed V et présentée à la justice, poursuivie pour trafic de drogue à l’échelle internationale. N’Diaye Amboise Mireille, s’est vue réclamer par la douane une amende de plus d’un milliard 300 millions de centimes, soit 6 fois la valeur de la marchandise saisie.
Samedi 22 décembre, nouvelle prise. Des policiers et douaniers du port de Tanger mettent la main sur un routier espagnol en possession de pas moins de 600 kilogrammes de Chira, dissimulés dans une «innocente» cargaison de 24 tonnes de tomates, destinée à la France.
Quelques jours plus tard, une nouvelle cargaison de plus d’une tonne de Chira est saisie à Chaouen. Ce ne sont que des prises communiquées de services ayant, au fil des années, développé un impressionnant savoir-faire en matière de lutte contre le trafic de drogue. Rien que dans la province de Larache, les services de la Gendarmerie Royale ont saisi, durant les mois d’août et septembre, plus de 4,5 tonnes de kif, 11 kg de tabac et 149 kg de Chira.
Pour un pays taxé volontiers par une certaine presse européenne de « narco-Etat », ou encore de « centre de cartels », le moins que l’on puisse dire est que les services chargés de la lutte contre le trafic de drogue, qui quasi-systématiquement met en évidence des commanditaires européens, font preuve d’un dynamisme inattendu. La Baraka ne peut tout de même pas opérer avec une si forte constance. Si des coups de filets sont opérés avec autant de succès, c’est que les autorités marocaines veillent au grain. N’en déplaise à ceux qui, sans débourser les fonds nécessaires, ni apporter le soutien que requiert la solution d’un problème commun, continuent à exiger de ce côté de la Méditerranée, l’éradication de produits qu’ils dépénalisent de l’autre. La règle immuable de l’offre et de la demande opère dans ce dossier comme dans tout autre. Les quantités de drogue saisies sont destinées à des consommateurs européens, commanditées par des trafiquants européens et passent les frontières européennes, plus facilement qu’ils ne traversent les filets marocains.
La position du Maroc a de tout temps été claire à ce sujet. Des traces en sont trouvées en 1886 déjà, sous le règne du Sultan Moulay Hassan 1 er, dans une lettre adressée par le ministre des Finances à l’époque Abdeslam Tazi au ministre d’Etat français Charles Freaud au sujet de la nécessité de prohibition du kif, de l’opium, des cigarettes et du tabac, introduits et commercialisés au Maroc par les … Français. Dès les tout premiers jours de l’indépendance, feu SM Mohammed V interdisait la commercialisation du kif, legs du protectorat, jugé contraire à la religion et nuisible à la santé. A partir de 1978, le Royaume, cultivateur de cannabis malgré lui, demandait par la voix de feu SM Hassan II le soutien des organisations mondiales pour venir à bout de ces cultures dans le Nord. Une année plus tard, en 1979, le Maroc ratifiait la convention internationale de lutte anti-drogue et devenait membre associé du groupe de Trévi. En octobre 1992, le Maroc ratifiait la convention de Vienne et lançait un vaste programme de développement des provinces du Nord. La campagne d’assainissement de 1996 permettait de mettre sous les verrous nombre de barons de la drogue dans la région Nord, même si sur l’échiquier international leur envergure était relativement insignifiante. Une année plus tard, en juin 1997, le Maroc détruisait devant des experts internationaux un lot record de 6 tonnes de cocaïne pure échouée sur les côtes du Royaume, d’une valeur de 1,5 milliard de dollars ! Au moment où en Europe l’on continue à dépénaliser les drogues douces, les efforts du Maroc pour en finir avec cette image, finiront-ils en fumée .. comme les tonnes de cocaïne pure incinérées à l’usine Lafarge ?