«J’ai annoncé au Premier ministre que j’acceptais le poste de ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement sortant», a déclaré mardi l’ancien premier ministre Benjamin Netanyahu, savourant une victoire qui n’est pas complètement la sienne. Son grand rival au sein du Likoud venait en effet d’annoncer quelques heures plus tôt la tenue d’élections législatives anticipées. Condition que lui-même avait posée avant d’accepter de faire son entrée dans le cabinet Sharon.
Ce dernier avait cru, après le départ des Travaillistes mercredi dernier, pouvoir se dispenser d’une convocation des électeurs. Il avait multiplié les concertations avec les formations d’extrême droite. Ce qui lui a d’ailleurs permis de dépasser trois obstacles et autant de motions de censure déposées lundi par les députés de gauche à la Knesset. Mais le Premier ministre israélien s’est retrouvé incapable de rétablir une majorité parlementaire (55 voix seulement lui étaient assurées sur les 120 sièges que compte l’instance) après que le parti d’extrême droite Israël Beitenou (Union Nationale) ait rejeté son offre de rejoindre la future coalition.
Pourquoi ce revirement des ultras ? Le chef de l’Union nationale, Avigdor Lieberman, avait conditionné son ralliement à la dénonciation officielle des accords d’Oslo, à l’expulsion de Yasser Arafat, et au rejet de la création d’un Etat palestinien. «Je ne toucherai pas aux ententes stratégiques avec les Etats-Unis pour ne pas compromettre les relations privilégiées que j’ai réussi à lier avec la Maison blanche», lui a répondu le Premier ministre. Lequel s’est donc résigné mardi à dissoudre la Knesset et à convoquer des élections anticipées «dans les 90 jours», le 4 février selon les médias. Une décision qu’il a annoncée après avoir consulté le Président israélien Moshé Katsav comme le veut le protocole.
Selon les observateurs, ce revirement d’Ariel Sharon souligne l’instabilité croissante du pays alors qu’Israël est confronté à plusieurs problèmes : l’échec de la politique actuelle vis à vis des Palestiniens, une crise économique qui s’aggrave, et l’éventualité d’une attaque irakienne en cas d’intervention américaine contre le régime de Baghdad. Des perturbations qui pourraient entraîner la chute du Premier ministre, désormais confronté à la montée en puissance de son grand rival Benjamin Netanyahu. «Ces élections en ce moment ne sont pas ce dont le pays a besoin», a d’ailleurs avoué le chef du gouvernement, ajoutant qu’il n’avait pas d’autre choix que de les convoquer. Côté palestinien, on attend beaucoup de ce scrutin. Mardi, le principal négociateur Saëb Erakat a déclaré que son peuple espérait que les Israéliens choisissent «une direction capable de construire la paix». «Les Israéliens méritent des dirigeants meilleurs que les dirigeants actuels», a-t-il ajouté tout en reconnaissant qu’il s’agissait d’une affaire israélienne intérieure.
Nabil Abou Redneh, conseiller de Yasser Arafat, a lui aussi émis l’espoir que les Israéliens choisiront un gouvernement différent. «Ce qui nous intéresse aujourd’hui, c’est un gouvernement israélien engagé dans le processus de paix, parce que le gouvernement actuel n’a obtenu ni la paix ni la stabilité pour la région», a-t-il souligné. Preuve en est, le dernier attentat survenu lundi près de Tel Aviv. Un kamikaze palestinien s’est fait exploser dans un magasin d’électronique d’une galerie commerciale de Kfar Saba, entraînant dans la mort deux personnes et faisant, selon la police, une trentaine de blessés. Cet attentat a eu lieu au moment même où la Knesset tentait de constituer une coalition droite/extrême droite.
Le journal Al Quds al Arabi, basé à Londres, a annoncé mardi que l’attentat avait été revendiqué par la Brigade Al Qods, liée au Djihad islamique. Cette action est par ailleurs intervenue quelques heures après l’«assassinat ciblé» de Naplouse, en Cisjordanie, d’un activiste du Hamas recherché par l’armée israélienne. Une autre personne a été tuée et quatre passants blessés par la roquette, vraisemblablement tirée par un hélicoptère, qui a pulvérisé le véhicule. Le même jour, les forces israéliennes ont tué cinq autres Palestiniens dans la bande de Ghaza lors d’accrochages distincts.