La prise d’otages de plusieurs centaines de personnes dans un théâtre de Moscou est l’illustration de l’escalade que vit le long et sanglant conflit russo-tchétchène.
Cette guerre sans nom que subissent les Tchétchènes depuis septembre 1999 est particulièrement inhumaine : population déplacée, bombardements aveugles, pillages, viols et crimes de guerre sont le lot quotidien des exactions imposées aux tchétchènes.
C’est un véritable désastre humain qui se joue dans cette région dans l’indifférence quasi totale de la communauté internationale. À l’origine, ce fut la disparition de l’URSS. Les héritiers de l’empire éclaté, devenu Fédération de Russie, furent incapables de proposer aux minorités, restées dépendantes de la nouvelle entité étatique russe, un statut d’autonomie à partir de critères démocratiques respectueux des droits de l’homme. On se contenta juste de mettre en place un fédéralisme de façade, tout en continuant d’exploiter les richesses propres à chacune de ces régions soi-disant autonomes, comme le pétrole.
La Tchéchènie a particulièrement mal vécu cette aliénation aggravée par une misère atroce qui a contribué au renforcement du sentiment nationaliste et à la résurrection d’un Islam sunnite pur et dur. Les missionnaires wahhabismes, venus d’Arabie saoudite, y connurent un franc succès. Mais ils n’étaient pas seuls à encadrer les Tchétchènes. Le chaos ambiant a permis l’émergence de véritables mafias qui prolifèrent grâce au désordre ambiant. Progressivement, la Tchétchènie devient ingouvernable. Jusqu’au jour où Moscou décida d’y mettre de l’ordre avec l’avènement d’un Poutine qui n’a pas raté l’occasion de s’en servir pour asseoir sa légitimité d’homme d’État capable d’empêcher l’éclatement de la Fédération de Russie.
Une dimension politicienne qui s’est greffée aux enjeux économiques et stratégiques de suprématie sur tout le Caucase. Les Tchétchènes résisteront avec la force du désespoir, infligeant parfois de lourdes pertes aux troupes russes. Mais la cause était entendue, et des opérations d’éclat du genre de la prise d’otages du théâtre de Moscou restent leur dernier et ultime recours.