Soulagés, les quinze membres de l’actuelle Union européenne se sont félicités dimanche et lundi de l’approbation par les Irlandais du traité de Nice. Il faut dire que lors d’un premier référendum en juin 2001, l’Irlande avait refusé par 54 % de voix l’idée d’intégrer des nouveaux membres au sein de l’UE – ce que prévoit le traité – hypothéquant ainsi tout élargissement auquel doivent adhérer tous les Etats-membres de l’Union. Ce retard – que Dublin expliquait par la crainte de la population de voir la neutralité militaire de l’Irlande menacée, tout comme son économie et son influence à Bruxelles – n’est aujourd’hui plus qu’un douloureux souvenir.
Le «oui» de samedi a même été qualifié de massif et «franc» par le premier ministre Ahern, puisqu’il l’a emporté avec 62,89 % des voix. Aucune des 42 circonscriptions que compte le pays n’a voté contre. Le président du Parlement européen, l’Irlandais, Pat Cox, a pour sa part estimé que «le défi qui attendait les chefs d’Etat et de gouvernement la semaine prochaine (lors du sommet) à Bruxelles, consisterait à comprendre le message du peuple» irlandais. «Nous sommes favorables à l’élargissement et son heure a sonné», a-t-il expliqué dimanche. Si l’ouverture de l’UE à dix nouveaux pays en 2004 vient de franchir une étape institutionnelle primordiale, la fin du parcours n’est cependant épargné par les embûches. Reste – parmi les nombreux dossiers – la question du financement de cette ouverture à la Pologne, la Hongrie, la République tchèque, la Slovaquie, la Slovénie, la Lituanie, la Lettonie, la Estonie, Chypre et Malte.
Ces lundi et mardi, les ministres des affaires étrangères devaient d’ailleurs se réunir à Luxembourg afin de peaufiner la réunion de jeudi et vendredi à Bruxelles. Sommet au cours duquel les chefs d’Etat et de gouvernement devront trouver un accord sur le financement de l’élargissement de l’Union. Si la récente démission du gouvernement néerlandais inquiétait encore les Européens inquiétés par tout ralentissement de procédure, le dossier le plus discuté devait cependant être celui des subventions agricoles accordées aux nouveaux venus. Question qui oppose Paris et Berlin depuis des mois, à un degré tel que les deux chancelleries ont évoqué l’idée de ne pas parvenir à un compromis à Bruxelles.
Le projet proposé par la Commission européenne et soutenu par la France est d’accorder des aides progressives avec pour point de départ, 25 % de celles touchées par les agriculteurs des Quinze. Ces subventions n’atteindraient 100 % qu’en 2013, ce qui éviterait d’ici-là de remettre en cause la politique agricole commune. Réformer la PAC est au contraire l’idée défendue par Berlin qui souhaite limiter les aides au maximum afin d’envisager un allègement immédiat de la facture de la PAC. Restaient aussi dans les questions en suspens les aides régionales aux futurs Etats membres, leurs contributions au budget communautaire et les compensations à prévoir pour qu’aucun n’ait à payer à l’entrée dans l’UE plus qu’il n’en recevra… Autant dire que ce processus d’élargissement n’est pas encore arrivé au bout de ses peines. Après Bruxelles cette semaine, il y aura Copenhague en décembre. Et si, comme ils l’espèrent, les Quinze parviennent à y boucler leurs dossiers, il faudra encore obtenir la ratification par chacun des membres actuels de l’UE du traité d’adhésion des nouveaux entrants…