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À la recherche du blé perdu

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Élisant domicile sur la grande avenue Mohammed VI, à Casablanca, le souk du blé en graine et des légumes secs est dans un état déplorable. Les locaux ont été construits en 1930, et depuis cette date ils n’ont connu aucune opération de rénovation. Les commerçants ont essayé, à plusieurs reprises, de contacter les autorités locales pour décrocher une autorisation de restauration, mais en vain.
Le doyen des vendeurs de blé en graine et des légumes secs, Kamar-Eddine Mohamed, affirme que «la ferme volonté des commerçants de rénover les lieux est toujours confrontée à l’indifférence des autorités qui gèrent ce souk». Il faut préciser que c’est la préfecture Al-Fida Derb Soltane qui perçoit le loyer de ces 320 commerçants ; le montant de la somme varie entre 150 et 200 Dh par mois, et ce en fonction de la superficie du magasin. Sur une surface avoisinant les quatre hectares, le Souk, situé certes dans un lieu stratégique, attire de moins en moins de clientèle. Ces vendeurs se plaignent du changement du mode de consommation des Marocains et tirent la sonnette d’alarme. Kamar-Eddine Mohamed avoue, avec mécontentement, que ce métier est en décrépitude et que les Casablancais n’achètent plus comme auparavant le blé en graine et autres légumes secs.
Connaissant parfaitement cette évolution en matière de consommation, le doyen du souk affirme que ces commerçants s’obstinent à exercer ce métier et à fidéliser une certaine clientèle. «Les gens qui viennent chez-nous sont souvent des femmes qui tiennent à préserver nos traditions en matière de préparation du pain, et qui ne veulent plus s’approvisionner dans les grandes surfaces en farine ou chercher leur pain dans des boulangeries», ajoute-il. En offrant sur leurs étagères des légumineuses bien nettoyées et emballées, les grandes surfaces leur ôtent le pain de la bouche. Elles concurrencent le souk de blé en graine et des légumes secs, en proposant des produits répondant aux nouveaux critères des consommateurs : la date d’emballage et d’expiration, l’apport diététique, la qualité des graines…
L’autre grand problème qui rend la vie amère à ces commerçants est celui d’une éventuelle délocalisation, à côté des nouveaux abattoirs. Les autorités locales n’ont rien entrepris, jusqu’à présent, en ce qui concerne le déménagement, les commerçants, en conséquence vivent dans un stress permanent et dans une inquiétude quotidienne.
Le doyen ne cache pas sa peur et affûte, d’ores et déjà, ses armes. «Comment peut-on croire que notre clientèle nous suivra dans une zone pareille, alors que, ici, en plein centre ville, on a du mal à joindre les deux bouts ? Qui d’entre-vous parcourra une distance de plusieurs kilomètres pour acheter 12 kilogrammes de blé en graine ?», s’interroge-t-il. Des interrogations, parmi bien d’autres, qui puisent leur légitimité dans le mouvement de délocalisation qu’a connu récemment la filière des abattoirs.
Aujourd’hui, les commerçants du souk du blé en graine et des légumes secs continuent d’exercer dans une bâtisse délabrée et attendent, fatidiquement, le jour où la préfecture confirmera leurs doutes. Épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête, cet éventuel déménagement retentira fâcheusement sur leur vie.

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