Société

«L’autonomie est une bonne solution»

© D.R

ALM : Ancien élément influent au sein de la direction du Polisario, vous avez fait défection en 1994 pour vous offrir un long exil à Las Palmas avant de vous décider à rejoindre définitivement le Maroc. Qu’est-ce qui vous a, finalement, poussé à regagner la mère-patrie ?
Yahdih Daïf Allah : Je suis rentré dans mon pays le 24 mai 2006. Cela remonte à peu près à un mois, mais l’idée couvait dans ma tête depuis bien longtemps. Pour être exact, cela date de 1988, quand, après trente ans de militantisme au service de « la révolution sahraouie», je suis passé à l’opposition. A cette époque, je me suis rendu compte que la direction du Polisario s’était écartée des principes fondateurs de cette « révolution » dont on me prêtait (rires…) le «privilège » d’avoir été l’idéologue. Je n’étais d’ailleurs pas le seul à constater, in situ, à quel point le Polisario avait renié ses principes de départ pour devenir une bande de mafiosi prêts à vendre leur âme pour s’offrir des villas luxueuses dans les capitales européennes, au détriment d’une population de séquestrés assiégée, affamée, humiliée… J’ai, alors, fait cause commune avec plusieurs honnêtes gens qui sont aujourd’hui au Maroc. Je pense particulièrement à Omar El Admi, Ibrahim Hakim, Baya Mohamed Yahdih, Taghaya Allah Al Barazani… Spécialiste en physique et astrologie, j’ai continué à enseigner dans le collège « Aousserd », à Tindouf. Mais, vu le système répressif prévalant dans les camps-mouroirs, je ne pouvais dire tout haut ce que tout le monde pensait tout bas : le mythe du Polisario s’était évaporé.
La « cause du peuple sahraoui » n’était qu’un prétexte pour une poignée de parvenus, qui n’avaient d’yeux que sur leurs intérêts étroits. J’en veux pour preuve et exemple le détournement flagrant des aides humanitaires au seul profit d’une nichée d’opportunistes qui ont réussi à bâtir des fortunes colossales sur les ruines de pauvres familles séquestrées. Je ne pouvais, donc, rester là sans risquer de passer pour un complice de crimes contre l’humanité. Alors, j’ai décidé de quitter Tindouf en 1994 pour aller m’installer, l’espace de 5 mois, en Mauritanie, avant de mettre le cap sur Las Palmas (Iles Canaries). Depuis, je suis entré dans une sorte de « convalescence intellectuelle». J’avais besoin de prendre le recul nécessaire par rapport à de longues années d’endoctrinement idéologique. Mes contacts, quasi réguliers, avec les services consulaires du Royaume établis à Las Palmas m’ont, par ailleurs, aidé à surmonter cette crise pour me consacrer, dorénavant, à une seule et unique idée : ma patrie.

Quel a été le vrai déclic de votre retour dans le pays ?
C’est l’annonce par Sa Majesté le Roi Mohammed VI du projet d’autonomie pour les provinces du Sud. J’ai accueilli avec beaucoup d’enthousiasme cette initiative irremplaçable, irréprochable, et sans précédent. Le projet de consultations autour de cette initiative historique m’a également confirmé dans la conviction de rentrer, dans le dessein d’apporter ma petite pierre à l’édification d’un Maroc démocratique. Pour moi, le projet d’autonomie élargie pour le Sahara marocain est la solution idoine pour tourner définitivement la page d’un conflit factice, mais aussi mettre fin à la souffrance accrue des sahraouis marocains séquestrés. Devant cette nouvelle donne, le Polisario ne doit pas avoir l’embarras du choix. De deux choses, l’une : rentrer ou crever. Je demande, du haut de cette tribune, aux dirigeants du Polisario de saisir cette occasion historique offerte par SM le Roi pour rallier la mère-patrie, sinon ils se retrouveront, inéluctablement, dans la poubelle de l’histoire !

Quelle analyse avez-vous faite des dernières émeutes ayant éclaté dans les camps de Tindouf ?
Le Polisario est aujourd’hui un corps malade. Très malade. Il a le sentiment que sa fin approche. La manière disproportionnée avec laquelle il a réagi à ces dernières émeutes peut être interprétée comme une tentative désespérée de survie. Maintenant, en ce qui concerne les émeutes elles-mêmes, tout en reflétant la colère grandissante d’une population en proie à la gabegie, elles viennent planter un nouveau clou au cercueil d’un mythe qui n’a plus de raison d’être. En butte au risque d’une inévitable implosion, ce mythe n’intéresse en plus presque plus personne à l’échelle internationale. Pour s’en rendre compte, il suffit de se demander pourquoi beaucoup de pays ont retiré leur reconnaissance de la RASD.

Que pensez-vous des menaces de retour aux armes proférées par Mohamed Abdelaziz ?
Le Polisario a toujours bâti sa politique sur une stratégie de provocation. Cette entité n’a, d’ailleurs, pas d’existence en dehors de la propagande. Mais là, il faut reconnaître que sa machine propagandiste a fonctionné à merveille. Le Royaume est appelé, pour sa part, à renforcer sa contre-offensive pour dévoiler les visées de ce qui n’est, ni plus ni moins, qu’une supercherie héritée de la Guerre froide.

Et la responsabilité de l’Algérie dans tout cela ?
L’Algérie est, d’abord, restée prisonnière d’une vieille rancune à l’égard du Maroc. Ce pays ne digère toujours pas le fait que le Royaume ait revendiqué la reprise de Tindouf et de Béchar, lors des négociations de 1961 au sujet de l’Indépendance de l’Algérie. Pour le voisin de l’Est, ce n’était pas le moment opportun pour faire des revendications territoriales. Ensuite, l’Algérie voulait, à travers la création d’un Etat-satellite dans le sud du Royaume, s’assurer une porte de sortie vers l’Atlantique. Et puis, ce pays a toujours considéré que son hégémonie sur le plan régional (Maghreb) passerait par l’affaiblissement du Royaume. Ce qui s’est avéré être, là encore, une grosse chimère. 

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