Culture

FITUC : Arrabal le marocain

© D.R

Face à une participation étrangère très forte, il n’y a pas mieux que l’Isadac pour faire le contrepoids. Ainsi, à chaque édition, les étudiants de l’Institut d’art dramatique de Rabat donnent à la participation nationale un accent particulier. Cette année, ils ont fait un choix doublement significatif. En jetant leur dévolu sur le texte « Fandou et Lise », ils ont, sans doute, voulu rendre hommage à un auteur qui a vu le jour sur le sol marocain, le 11 août 1932 à Melilla. Il s’agit de Fernando Arrabal, un dramaturge qui s’est illustré par la dureté de son écriture dramatique (théâtre de cruauté) mais aussi par ses fameuses diatribes contre le général Franco. Sa correspondance « Lettre à Franco » est aujourd’hui présentée comme un document historique sur les excès arbitraires du dictateur espagnol. Arrabal n’aurait jamais oublié que ce despote avait condamné son père à une peine d’emprisonnement à vie à cause de sa fidélité à la démocratie.
Le choix des étudiants de l’Isadac se veut ainsi une expression d’admiration pour le dramaturge-militant. Un autre choix vient revendiquer la «marocanité» de Fernando Arrabal, né, rappelons-le, dans le préside marocain occupé. En adaptant «Fandou et Lise», Abdelati Lembarki, enseignant à l’Isadac, donne à ce texte écrit en espagnol une langue et une âme locales. La transplantation de ce texte dans la réalité marocaine aura été facilitée par l’aspect universaliste de la pièce d’Arrabal, sachant bien que le thème fédérateur de cette pièce traite de l’absurdité de la vie quotidienne, voire de la cruauté (thème favori d’Arrabal) à laquelle les habitants de la planète Terre sont confrontés. Pour la petite histoire, « Fandou » (personnage campé par le comédien prometteur Saïd Aït Baja) et « Lise » (femme de Vandou personnifiée par la non moins talentueuse Amal Benhaddou) font leur chemin vers une ville appelée « Tare ». Sur leur chemin, -long et pénible-, le couple est confronté à des questions d’ordre existentiel. Le vertige que semble leur donner cet « infiniment grand », -pour reprendre une expression pascalienne-, est source de  malentendus, voire de disputes qui viennent empoisonner le voyage du couple.
Le traitement que  «Fandou» inflige à son épouse pourtant paralysée est l’illustration de cette cruauté inhérente à la condition humaine. «Lise», après avoir perdu l’usage de ses jambes, se voit traîner comme une chienne en laisse. Simplement, si la cruauté est le dénominateur commun du théâtre d’Arrabal, il n’en reste pas moins que ce théâtre fait aussi place à la poésie. Ce dernier point n’a, hélas, pas été pris en compte par le metteur en scène Abdelati Lembarki. Les spectateurs, qui se sont déplacés mardi dernier au Complexe Sidi Belyout, auront évidemment constaté que le metteur en scène, en tablant sur la cruauté, a un peu forcé le trait. Le côté burlesque aurait ainsi pu être exploité pour alléger l’atmosphère cruelle dans laquelle se déroule l’histoire, d’autant plus que dans la pièce, il y a trois personnages comiques qui n’ont pas été bien utilisés pour faire ressortir justement cet aspect absurde qui est au cœur de la pièce d’Arrabal.
N’empêche, la troupe de l’Isadac s’est rattrapée sur le registre de l’interprétation. Il faut saluer le jeu des jeunes comédiens Saïd Aït Baja et Amal Benhaddou et, à travers eux, l’effort du metteur en scène, Abdelati Lembarki, qui a bien su diriger ses comédiens.

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