Culture

L’euphorie des voies de la création

© D.R

A son arrivée à la place Bab Makina, Sar la Princesse Lalla Salma a été saluée par Chakib Benmoussa, ministre de l’Intérieur, Mohamed Boussaid, ministre du Tourisme et de l’Artisanat, Touriya Jabrane Kryatif, ministre de la Culture, Mohamed Kebbaj, président de la fondation Esprit de Fès ainsi que par Mohamed Rherrabi, wali de la région Fès-Boulemane, gouverneur de la préfecture de Fès.
Le concert inaugural a été donné par la diva et soprano Jessye Norman, accompagnée par l’orchestre lyrique régional Avignon-Provence (France), et pour la première fois dans l’histoire du festival, la baguette du maestro avait été confiée à l’Américaine Rachael Worby, directrice musicale de l’orchestre de Pasandena, dont elle a largement contribué au développement local et national aux USA. Elle a dirigé de nombreux orchestres à travers le monde: l’orchestre symphonique de Barcelone, London philharmonic Orchestra, le China philharmonic orchestra à Pékin… Rappelant que le budget de la 14ème édition du Festival des musiques sacrées du monde, inscrite cette année dans le cadre de la célébration du 1200ème siècle de la fondation de la ville de Fès, s’élève à 11 millions DH. L’orchestre lyrique régional Avignon – Provence collabore depuis sa création à toutes les saisons lyriques de l’Opéra-Théâtre d’Avignon. D’abord orchestre lyrique, il a aussi très largement exploré le répertoire symphonique sous la direction de très nombreux chefs d’orchestre prestigieux invités, parmi lesquels figurent; Jean-Jacques Kantorow, Jean-Claude Malgoire et Kent Nagano.
L’orchestre aborde un répertoire étendu, allant du baroque à la création contemporaine. Il a accompagné de grands solistes internationaux comme Patrice Fontanarosa, Marie-Josèphe Jude, Laurent Korcia, Bruno Rigutto, et a également travaillé avec de grands interprètes lyriques tels que Luciano Pavarotti, Monserrat Caballé, José Van Dam, Barbara Hendricks, Roberto Alagna, Térésa Berganza.
L’après-midi du samedi 7 juin fut marquée par le concert de Ghada Shbeir (Liban) qui, au milieu de la beauté paradisiaque du Musée Batha, où un doux vent printanier faisait caressait les feuilles des arbres millénaires, berçait de sa douce voix les nombreux spectateurs présents dans ce lieu mythique. Le concert était composé de chants des églises chrétiennes d’Orient. Le syriaque, une branche de l’araméen, la langue ancienne couramment parlée dans le Moyen Orient antique, a été merveilleusement interprété par la ravissante Ghada Shbeir. C’est à cet Orient du christianisme des origines, que se réfèrent les chants de Ghada Shbeir. Qu’elle ait chanté en syriaque ou en arabe, sa voix a réussi à emporter l’auditoire dans les sphères spirituelles du recueillement et du silence intérieur. La soirée du samedi 7 juin était grandiose. Elle a réuni dans une parfaite communion, Américains et pakistanais, Craig Adams and The Voices of New Orleans et Faiz Ali Faiz et son ensemble. Le concert s’est inscrit sous le thème «Chants sacrés afro-américains et soufis». Le projet «Gospels, Spirituals et Hymns-Qawwali» est une rencontre entre cultures, pratiques vocales et liturgiques qui fait suite au rendez-vous Qawwali-Flamenco : un disque et un spectacle créés en 2004. L’origine des chants Qawwali dans le sous continent indien est profondément liée à l’implantation et à la propagation des confréries soufies qui s’y répandirent à partir du XIIIème siècle.
Le Qawwali, créé par le mystique, poète et musicien Ameer Kushraw, au XIIIème siècle, est la forme du Samaâ propre à la culture indo-musulmane, qui s’adressait d’abord aux exclus, et dont les mélodies et les rythmes sont empruntés à la musique hindoustanie. Quant aux chants sacrés afro-américains, Spirituals, Hymns et plus tard Gospel, nés plus particulièrement au XIXème siècle aux USA, ils émanent de la communauté noire qui aspirait à se libérer de son exploitation, en s’appuyant sur la Bible et ses promesses de retour à la Terre promise. Ces deux traditions musicales dessinent leurs textes à partir de l’expérience intime et quotidienne, visant l’émotion la plus puissante à travers le chant. Elles partagent des bases communes : la religion musulmane pour l’une et chrétienne pour l’autre, des performances vocales entre un chanteur principal et un ensemble qui lui répond, une puissance évocatrice sans limite, qui provoque parfois un état proche de la transe. Le spectacle s’est déroulé en trois volets : La musique sacrée afro-américaine interprétée par Craig Adams – membre du jury des US Gospel Grammy Awards- and The Voices of New Orleans, la musique soufie des qawwals portée par Faiz Ali Faiz, fils spirituel de Nusrat Fateh Ali Khan, nominé aux BBC World Musics Awards 2008. Quant à la troisième partie, elle a réuni les deux ensembles dans une fusion créée par Martina A. Catella. Un rendez-vous entre deux immenses musiciens, compositeurs, vocalistes et instrumentistes, entre deux cultures sacrées, où chacun invitant l’autre dans l’espace de sa parole musicale, de l’intimité de son chant. A une époque où les tendances aux replis identitaires se multiplient à la surface de notre planète, cette rencontre entre deux grandes traditions musicales et spirituelles, avec des artistes venant de pays au contexte socio-politique si éloigné, nous affirme de nouveau que le dialogue des cultures est bien possible et peut être plus que jamais nécessaire.

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