Culture

Plages : touche pas à mon Sable !

© D.R

Larache. Sur la route de Tanger, une file indienne de camions remplis de sable fait la navette entre les deux villes. Quotidiennement, ce sont des tonnes de sable qui sont déversées dans les énormes chantiers de la ville du Détroit. Le business est juteux. Le m3 du sable se vend aujourd’hui à 200 Dh, contre seulement 100 Dh avant le début de la crise. Une activité qui génère beaucoup de cash.  La fermeture de la plage Houara, à 20 km au sud de Tanger, s’est répercutée sur le prix de cette matière indispensable pour le secteur du BTP. Depuis, le besoin des chantiers en cours n’est assuré qu’à hauteur de 2.000 m3, alors que le besoin quotidien est estimé à 5.000 m3 de sable.
La flambée des prix a escamoté le déséquilibre écologique que connaît la région.
Les opérateurs du secteur multiplient récemment les réunions avec les responsables du ministère de l’Équipement. Ils se sont rencontrés en début de semaine, à Tanger, pour débattre de la sévère pénurie de sable qui a occasionné un ralentissement d’activité de 70 % sur l’ensemble des chantiers de la région. À l’horizon, deux solutions pour accompagner cette forte demande. Le sable de dragage et le sable de concassage. Les professionnels ne veulent pas du premier en raison de sa teneur en sel et en éléments organiques. Le sable de concassage est l’option qui s’impose. Encore faut-il investir dans les matériaux nécessaires à cette technique. La cessation de l’exploitation des carrières de sable n’est pas pour demain.

Tanger, le provisoire qui dure
L’exploitation de la plage Houara remonte aux années 1970. C’était pour lutter contre l’ensablement de la route nationale N1 au niveau du tronçon compris entre les Pk. 21 et 25. Ironie de l’histoire. Trente ans après, la décision de fermeture définitive est justifiée par une exploitation excessive des sables mettant en péril l’équilibre de l’écosystème de cette zone côtière. Étendue sur 4 km, la plage Houara fournit les énormes chantiers de Tanger.
Elle faisait également nourrir des familles. Des pelleteurs ont même élu domicile, depuis des années, à quelques pas de cette plage. Près de 600 personnes vivaient du sable et se retrouvent aujourd’hui au chômage. Aucune solution n’a été trouvée pour le moment à cette crise sociale. Des sit-in sont organisés depuis le début du mois de mars. En vain. Les autorités brandissent la carte de la préservation de l’environnement et les pelleteurs celle du droit au travail.

Cap sur Larache
Quand le bâtiment va…tout va. Et l’on n’y va pas par quatre chemins. Après Tanger, les centaines de camionneurs qui opéraient dans la plage Houara ont mis le cap sur Larache. Dans cette petite ville, il y a du pain sur la planche. Le prix du sable à l’extraction est compétitif. Le rush des camionneurs renseigne sur la teneur des carrières de sable. En effet, Larache verra, l’année prochaine, l’ouverture d’une grande station touristique, à Lixus. Une source bien informée annonce que les travaux d’aménagement nécessitent l’extraction du sable.
« C’est d’ailleurs pour cette raison que les autorités ont décidé de fermer subitement la plage Houara. En plus donc de l’aménagement de la station, il y a aussi une activité parallèle de vente de sable ! », ajoute notre interlocuteur. Une manière de faire d’une pierre deux coups. Et c’est la société d’aménagement Salixus qui réalise ce projet inscrit dans le cadre du Plan Azur.
En effet, une convention a été signée, en octobre 2004, entre le gouvernement marocain et un groupe international pour l’aménagement de la station touristique de Lixus. Salixus regroupe deux opérateurs économiques mondiaux qui sont le géant belge de l’immobilier et de l’aménagement Thomas & Piron (T&P) et l’opérateur hollandais Colbert Orco. L’aménagement de cette station a nécessité des investissements de l’ordre de 5,6 milliards de DH, dont 1,4 milliard de Dh sous forme d’investissements in site et 560 millions de DH sous forme d’investissements directs. L’objectif est de créer une unité hôtelière d’une capacité de 330 lits, de 245 villas de 1470 lits et de deux parcours de golf.

Sables mouvants…
Quant le bâtiment va, les plages trinquent…la nuit. Généralement, les opérations de pillage de sable se font en principeà l’abri des regards indiscrets et à l’insu des autorités locales. Contre ce phénomène qui prend de l’ampleur, Kénitra vient de mettre en place de nouvelles mesures. Le tonnage est désormais limité à 40 au lieu de 70 auparavant.
La région qui compte 45 carrières « produit » près d’un million de m3 par an. Cette quantité ne prend pas en compte les énormes quantités de sables extraites en catimini.   Casablanca, elle aussi, n’échappe pas à l’appétit des pilleurs. Les bandes opèrent plutôt sur les plages de la commune de Dar Bouazza, Aïn Harrouda et Sidi Bernoussi. Depuis le début de l’année, 13 personnes ont été arrêtées et déférées devant le tribunal de première instance pour association de malfaiteurs et vol qualifié.
Les premiers éléments d’enquête révèlent que ces actes de pillage ont généré pour leurs auteurs des revenus estimés à plusieurs millions de dirhams durant ces trois dernières années. Entre la surexploitation et le pillage, les carrières de sable se vident peu à peu. La plage Houara a tiré la sonnette d’alarme. Mais, il n’y a toujours pas d’écho. Les plages marocaines continuant à subir un pillage à grande échelle. Souvent dans l’indifférence des autorités compétentes.

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