Culture

Pourquoi les Marocains tardent à se marier

© D.R

Peut-on parler de crise du mariage ? Les sociologues s’accordent à dire non. «On ne peut parler de crise de mariage, cela serait exagéré. Par contre, ce que l’on peut affirmer c’est que l’âge du mariage a reculé. Les gens se marient beaucoup plus tard», affirme le sociologue Jamal Khalil. L’allongement de la durée des études, l’autonomie des femmes, la hausse du niveau de vie … sont autant de facteurs qui expliquent ce retard dans le mariage. Les difficultés d’accès au logement constituent un frein pour ceux qui souhaitent s’unir. «Autrefois, les gens se mariaient et vivaient avec leurs parents. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Les jeunes couples veulent vivre indépendamment et avoir plus d’intimité.Cela dit, ils peinent à trouver un logement», explique M. Khalil. Le manque de moyen financier explique également pourquoi les Marocains tardent à se marier. «Le mariage reste un idéal et une norme. C’est le cadre qui a changé. Le mariage est remis en cause pour des raisons pécuniaires. Les jeunes n’ont pas les moyens financiers. S’ils refusent de s’engager c’est uniquement par peur de ne pas subvenir aux besoins du couple», explique le sociologue Abdessamad Dialmy. C’est le cas de Mehdi,24 ans, téléconseiller dans un centre d’appel. «Si j’avais un bon salaire, je n’hésiterai pas une seconde à me marier. La stabilité affective ne peut pas exister en dehors du mariage. Cela fait trois ans que je n’accepte plus les relations éphémères ». Et à l’inverse, on peut se demander quelles sont les raisons qui empêchent les hommes et les femmes ayant une bonne situation matérielle à se marier. «Ce sont des gens qui cherchent l’âme sœur. Ils refusent de se marier avec n’importe qui. Les femmes d’un rang social aisé sont très sélectives concernant le choix du conjoint», relève M. Dialmy. Une idée partagée par le sociologue Jamal Khalil. «Lorsqu’un homme ou une femme se marie, c’est avec une personne issue de son rang social. Rares sont ceux qui s’unissent avec quelqu’un d’un milieu social inférieur». Si le mariage se fait de plus en plus tardif, c’est aussi parce que les gens veulent profiter de leur jeunesse et se lancer dans une carrière avant de se lancer dans la vie familiale. C’est le résultat d’une évolution des mentalités et d’un changement de mode de vie.
De plus en plus d’hommes et de femmes n’osent pas franchir le pas et préfèrent vivre dans le célibat. Pour essayer de comprendre quelles sont les raisons qui expliquent cette situation, nous avons recueilli plusieurs témoignages. Rita encore sous le choc après sa rupture raconte : «Les hommes sont de bons comédiens. J’ai vécu une véritable histoire d’amour pendant quatre ans. Karim m’avait promis le mariage.Il ne cessait de me répéter qu’il voulait fonder un foyer et avoir plusieurs enfants. Au fil du temps, Karim a commencé à être plus distant. On se voyait plus rarement. Follement amoureuse de lui, je n’arrivais plus à dormir, ni à manger. Pour moi, la vie n’avait aucun sens sans lui. J’ai finalement appris par le biais d’une amie qu’il entretenait  une relation avec une autre fille plus âgée que moi et ce durant un an et demi. Au départ je ne l’ai pas cru. Pour en avoir le cœur net, j’ai invité Karim à prendre un café et il m’a tout avoué. Depuis, je ne fais plus confiance aux hommes.Je suis devenu très méfiante.Je préfère vivre seule plutôt que de m’engager dans une relation  qui m’anéantira à nouveau». Pour  Nadia, 24 ans, esthéticienne, la responsabilité est le principal frein au mariage. «Certains hommes sont de véritables égoïstes. Ils ne pensent qu’à eux-mêmes. Dés qu’ils obtiennent ce qu’ils veulent, ils vous jettent comme une serpillière. Ils sont incapables de franchir le pas. Ils préfèrent rester célibataire et vivre leur vie plutôt que de s’engager pour la vie. La responsabilité leur fait peur». Youssef, 30 ans, informaticien voit les choses autrement. «Pour moi le mariage est une équation. Ceux qui croient que le mariage est la finalité d’une relation d’amour se trompent. C’est vrai que cela marche dans certains cas, mais il ne faut pas généraliser. La plupart des couples qui se marient de nos jours le font parce qu’ils ont un besoin de procréation. Une fois les enfants naissent, la relation entre le couple devient plus affective même si ce n’était pas le cas avant le mariage. N’est-ce pas aussi de l’amour!». Autre témoignage, celui de Nadine, 21 ans, étudiante en droit, à la recherche de l’âme sœur. «Je suis toujours en quête de la personne qui me comprendra et avec qui je pourrai partager le reste de ma vie. Malheureusement les mauvaises expériences que les hommes ont eues auparavant les ont rendus schizophrènes et égoïstes. Ils sont devenus traumatisés. Pour eux, une relation représente un contrat à durée déterminée qui peut être facilement rompu et sans aucun engagement de la part du partenaire. J’en veux énormément à ces filles superficielles qui ont déformé l’image de la «bent nass». Kenza, 24 ans, cadre bancaire, explique l’augmentation du célibat en raison d’une plus grande liberté chez la femme et son désir d’épanouissement. «La femme est de plus en plus indépendante. Son autonomie matérielle et intellectuelle fait d’elle une personne déterminée. Chose qui est mal vue par les hommes. Ils pensent que la gent féminine est devenue de plus en plus exigeante. Actuellement ; les femmes sont de plus en plus libres dans leurs choix. À l’instar des hommes, elles multiplient les conquêtes et vivent librement leurs intimités. Cette liberté leur permet d’assouvir leurs besoins affectifs. Tous ces facteurs poussent l’homme et la femme à refuser les engagements durables et sérieux». Pour ceux ou celles qui sont encore célibataires, ne visez pas trop haut et n’attendez pas l’âme sœur.


Plus de 290.000 actes de mariage en 2007


Selon les chiffres du ministère de la Justice, le nombre de mariages s’est élevé à 297.660 en 2007 contre 272.989 en 2006 soit une augmentation de 9%.  Le nombre de divorce a diminué avec 27.900 cas en 2007, soit un léger recul de 1,19 %par rapport à l’année précédente. Le divorce par consentement mutuel, l’une des nouvelles dispositions du Code de la famille, a totalisé près de 30 % des cas en 2007. Les modifications apportées au code ont permis à plus de femmes d’initier une procédure de divorce. En conséquence, 26.547 demandes de divorce introduites par des femmes ont été enregistrées en 2007, contre 14.181 par des hommes.

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