Culture

Rap marocain : écarts de langage, entre poésie et vulgarité

© D.R

Sirène de police, un flic avec son talkie-walkie appelle du renfort. S’en suivent arrestation et interrogatoire musclés avec violences, injures, jurons, insultes et blasphèmes. Est-ce de la réalité ou du cinéma ? Ni l’une ni l’autre, c’est du rap. Cet art emploie tout, y compris les gros mots, pour transmettre son message, pour immerger l’auditeur dans un réel vécu, plus vrai que nature, plus saisissant, plus rude et peu connu de tous. Casanégra (2009) est un film qui a remporté plusieurs prix en plus de la grande adhésion du public, malgré l’utilisation d’un registre jugé vulgaire et choquant par d’autres. En 2010 et après le succès de ce film, le grand public semble s’être libéré du tabou de l’emploi de «terme de la rue» dans l’art. Le champ semble encore plus libre devant le rap. Jusqu’à quel point le rap marocain adopte-t-il cette liberté de ton et de « l’injure » venue des USA.
Quelle est la limite de cette liberté ? Des questions sur une pratique du rap qui a ses adeptes et ses détracteurs, et qui cache le foisonnement de la société, la diversité et le niveau de conscience des rappeurs marocains, de leur culture et de leur mouvement, s’il y en a vraiment un. «Le rap n’est pas vulgaire. Il faut combattre ce cliché. Le rap est avant tout la voix du peuple, de sa jeunesse de sa vérité de sa colère et de sa vie quotidienne vraie et sans fard», lance Nores, l’un des vétérans du rap à Salé. De son vrai nom Dourouf Algueddare, la trentaine, il travaille aujourd’hui dans son home studio, enregistrant les instrumentaux et les maquettes pour les nombreux rappeurs de sa ville, Salé. «Le rap est devenue un fléau qu’on ne peut plus éradiquer. Tout le monde rappe, tout le monde a désormais accès au micro», souligne Nores, ce rappeur qui estime avoir été aussi bien éduqué par ses parents que par la rue. «L’emploi de mots virulents, n’est pas un manque d’éducation, mais un manque de maturité, de discernement et de culture», ajoute-t-il, avant de nuancer : «Il y a des mots sans lesquels l’intensité et la profondeur du message sont atténuées». Nores sort bientôt son 3ème Album «Gangster Arabe». Le message, le message, le message c’est l’obsession des rappeurs et il justifie tout. Pour le rappeur Hablo, Amine Sadiki, membre de jury du L’boulevard en 2008, le rap est une musique écoutée par des jeunes. «C’est-à-dire que ceux qui t’écoutent sont quelque part des potes, il y a une familiarité qui excuse l’emploi de paroles crues, nécessaires pour que le message soit reçu direct, bouscule et marque l’auditeur», précise-t-il. «Si tu entrais au commissariat le soir, ou tu marchais dans la rue, tu écouterais une belle liste de gros mots. Le rap ne fait que montrer la société telle quelle est. Mais il n’y a pas que des gros mots dedans. Ce n’est pas «un bordel», ajoute-t-il.
Donc le rap est un miroir de la société, un thermomètre de sa jeunesse. Pour Hatim, membre du groupe H Kayn, «le principal est de rester vrai». Le rap a aussi pour but de donner de l’espoir aux jeunes, de leur montrer la voie, de décrire la réalité et poser le doigt sur les vrais problèmes. « Ce n’est pas dans ma nature d’employer les gros mots dans ma vie de tous les jours donc dans mon rap. Mais cela ne m’empêche pas de faire passer le message». «Hakaynologie» est le dernier album de Hkayn, il comprend plein de thèmes liés aux jeunes et leur réalité. Le nom de l’album veut dire la science «du réel». « Le rap reste de l’art, chaque rappeur est libre de choisir ses mots et sa manière et enfin c’est le public qui juge», souligne Hatim. Mais quel est le degré de cette liberté ? Pour Younes Boumehdi directeur de la radio pour jeunes «Hit Radio, « Il n’y a pas de censure tant que ce n’est pas des insultes raciales et dans la limite des lois ». «Tous les rappeurs utilisent des termes de la rue, des mots communément admis par la jeunesse. Et on les diffuse sans souci», précise-t-il.
Pour Momo, du L’boulevard: «les gros mots dans le rap, ce n’est pas nécessaire. C’est comme le nu dans le cinéma, il y en a qui le font gratuitement, par provocation. Et il y en a pour qui c’est devenu un fonds de commerce». Même avis, avec des nuances pour la rappeur Mobydick : «pour quelques uns c’est nécessaire, c’est vendeur, ça attire, cela constitue une part de leur identité, il y en a qui exploite ce registre pour faire le méchant ». Et de conclure : «Il est encore tôt pour exploiter ce registre au Maroc. Parce que le rap est encore dans une phase où il doit convaincre les gens pour faire encore plus sa place. La meilleure manière pour cela c’est de donner au public une leçon, un rap qui peut bien sonner dans les oreilles ». D’ailleurs, selon l’avis de tous, les rappeurs marocains restent tout de même gentils et très bien éduqués par rapport aux rappeurs français ou américains. nSirène de police, un flic avec son talkie-walkie appelle du renfort. S’en suivent arrestation et interrogatoire musclés avec violences, injures, jurons, insultes et blasphèmes. Est-ce de la réalité ou du cinéma ? Ni l’une ni l’autre, c’est du rap. Cet art emploie tout, y compris les gros mots, pour transmettre son message, pour immerger l’auditeur dans un réel vécu, plus vrai que nature, plus saisissant, plus rude et peu connu de tous. Casanégra (2009) est un film qui a remporté plusieurs prix en plus de la grande adhésion du public, malgré l’utilisation d’un registre jugé vulgaire et choquant par d’autres. En 2010 et après le succès de ce film, le grand public semble s’être libéré du tabou de l’emploi de «terme de la rue» dans l’art. Le champ semble encore plus libre devant le rap. Jusqu’à quel point le rap marocain adopte-t-il cette liberté de ton et de « l’injure » venue des USA.
Quelle est la limite de cette liberté ? Des questions sur une pratique du rap qui a ses adeptes et ses détracteurs, et qui cache le foisonnement de la société, la diversité et le niveau de conscience des rappeurs marocains, de leur culture et de leur mouvement, s’il y en a vraiment un. «Le rap n’est pas vulgaire. Il faut combattre ce cliché. Le rap est avant tout la voix du peuple, de sa jeunesse de sa vérité de sa colère et de sa vie quotidienne vraie et sans fard», lance Nores, l’un des vétérans du rap à Salé. De son vrai nom Dourouf Algueddare, la trentaine, il travaille aujourd’hui dans son home studio, enregistrant les instrumentaux et les maquettes pour les nombreux rappeurs de sa ville, Salé. «Le rap est devenue un fléau qu’on ne peut plus éradiquer. Tout le monde rappe, tout le monde a désormais accès au micro», souligne Nores, ce rappeur qui estime avoir été aussi bien éduqué par ses parents que par la rue. «L’emploi de mots virulents, n’est pas un manque d’éducation, mais un manque de maturité, de discernement et de culture», ajoute-t-il, avant de nuancer : «Il y a des mots sans lesquels l’intensité et la profondeur du message sont atténuées». Nores sort bientôt son 3ème Album «Gangster Arabe». Le message, le message, le message c’est l’obsession des rappeurs et il justifie tout. Pour le rappeur Hablo, Amine Sadiki, membre de jury du L’boulevard en 2008, le rap est une musique écoutée par des jeunes. «C’est-à-dire que ceux qui t’écoutent sont quelque part des potes, il y a une familiarité qui excuse l’emploi de paroles crues, nécessaires pour que le message soit reçu direct, bouscule et marque l’auditeur», précise-t-il. «Si tu entrais au commissariat le soir, ou tu marchais dans la rue, tu écouterais une belle liste de gros mots. Le rap ne fait que montrer la société telle quelle est. Mais il n’y a pas que des gros mots dedans. Ce n’est pas «un bordel», ajoute-t-il.
Donc le rap est un miroir de la société, un thermomètre de sa jeunesse. Pour Hatim, membre du groupe H Kayn, «le principal est de rester vrai». Le rap a aussi pour but de donner de l’espoir aux jeunes, de leur montrer la voie, de décrire la réalité et poser le doigt sur les vrais problèmes. « Ce n’est pas dans ma nature d’employer les gros mots dans ma vie de tous les jours donc dans mon rap. Mais cela ne m’empêche pas de faire passer le message». «Hakaynologie» est le dernier album de Hkayn, il comprend plein de thèmes liés aux jeunes et leur réalité. Le nom de l’album veut dire la science «du réel». « Le rap reste de l’art, chaque rappeur est libre de choisir ses mots et sa manière et enfin c’est le public qui juge», souligne Hatim. Mais quel est le degré de cette liberté ? Pour Younes Boumehdi directeur de la radio pour jeunes «Hit Radio, « Il n’y a pas de censure tant que ce n’est pas des insultes raciales et dans la limite des lois ». «Tous les rappeurs utilisent des termes de la rue, des mots communément admis par la jeunesse. Et on les diffuse sans souci», précise-t-il.
Pour Momo, du L’boulevard: «les gros mots dans le rap, ce n’est pas nécessaire. C’est comme le nu dans le cinéma, il y en a qui le font gratuitement, par provocation. Et il y en a pour qui c’est devenu un fonds de commerce». Même avis, avec des nuances pour la rappeur Mobydick : «pour quelques uns c’est nécessaire, c’est vendeur, ça attire, cela constitue une part de leur identité, il y en a qui exploite ce registre pour faire le méchant ». Et de conclure : «Il est encore tôt pour exploiter ce registre au Maroc. Parce que le rap est encore dans une phase où il doit convaincre les gens pour faire encore plus sa place. La meilleure manière pour cela c’est de donner au public une leçon, un rap qui peut bien sonner dans les oreilles ». D’ailleurs, selon l’avis de tous, les rappeurs marocains restent tout de même gentils et très bien éduqués par rapport aux rappeurs français ou américains.

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