Editorial

Ça pylône à la télé

© D.R

La télévision est un métier dangereux. On y attrape vite la grosse tête. Et ensuite, adieu la valise… N’avez-vous jamais vu un ex de le la télé, une ancienne vedette du petit écran, errer ruminant sa gloire cathodique passée, dans le dénuement moral le plus apitoyant ? Ça existe malheureusement quand on plonge une bonne pâte dans un milieu acide aussi décapant que celui de notre télévision. Loin de moi l’idée, mais vraiment, de vous infliger une critique télévisuelle ramadanienne. Ça ne se fait plus tellement, il n’y a plus rien à dire depuis longtemps. Sauf peut être une remarque en passant : toutes les émissions de télévision chez nous relèvent de la catégorie de télé-réalité. C’est vrai, on n’a ni adopté, ni inventé ce concept qui fait fureur dans le monde des médias. Nous sommes tombés dedans naturellement. On fait de la télé-réalité sans le savoir. Nos infos, un monument du genre. Nos sit-com, plus vraies que nature. Nos émissions politiques, un summum, même avec une prod. de milliardaires ou un casting d’enfer on ne peut pas faire mieux. Les documentaires, les fictions, les émissions d’humour, la météo…Tout chez nous est télé-réalité, celle qui nous apprend plus sur la réalité de la télé que sur nous-mêmes. Même hors écran, quand on veut entretenir des pylônes d’émission, un geste banal partout dans le monde,c’est de la télé-réalité. Résultats : 2 morts et deux blessés. Il fallait le faire. Qui a écrit le scénario ? Qui est le réalisateur ? Et le producteur ? C’est personne. Quand on est croyant, on ne pose pas ce type de questions. Un câble a lâché, c’est tout. Vrai. Mais qui ne pète pas un câble à la télé ? C’est le pain quotidien du secteur. On pète les câbles, les plombs et les fusibles… Après, nous, on est obligé de récupérer ces gens dans un piteux état quand ils sont chassés par l’audimat ( c’est le nom qu’on donne chez nous au directeur). Aucun filet social n’est là pour atténuer l’épreuve dramatique. Aucun centre social de réhabilitation des anciens de la télé. Aucun centre de cure de désintoxication télévisuelle. Aucune semaine de solidarité avec les ex de l’écran. C’est grave à la veille des accords de libre-échange. La télévision marocaine a fait beaucoup de victimes pour construire son histoire. Elle vient de passer à une étape supérieure, elle s’est offert deux martyrs. Deux obscurs ouvriers, dont on ignore tout, tombés d’un vieux pylône bancal le matin d’un jour d’avis de tempête en plein Ramadan. Une caméra diligente a couvert le drame. Comme toujours, aucune tête de responsable n’est tombée, on a mis en place une commission d’enquête dont les membres seront probablement recrutés parmi les membres du fonds d’aide à la production télévisuelle. Une histoire comme celle-là est impayable. Il faut juste avoir un bon script de départ. Ici deux morts, à vous les studios…

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