Editorial

Éditorial

L’initiative parlementaire — PAM, Istiqlal, USFP — qui entend engager, dans le pays, un débat sur le thème «Médias et Société»  est une initiative qui ne mérite pas d’être rejetée à la légère. Ni rapidement caricaturée. Le mal dont souffre notre secteur est réel et profond. Au-delà des caractéristiques locales de cette crise, et elles sont nombreuses, on peut dire que la crise est mondiale, surtout au niveau de la presse écrite. Minée par la gratuité, y compris celle d’Internet, la non rémunération des contenus, le hors-média, le bradage TV, etc. la presse écrite se meurt. Chez nous, tout soubresaut, notamment commercial,  en réaction à cette crise, se fait au détriment de la déontologie du métier. Pour vendre, — et c’est une question de survie — il faut aller de plus en plus loin dans le sens contraire des  exigences éthiques et professionnelles. La plupart du temps cette démarche aboutit à une impasse judiciaire, et la justice marocaine peu préparée à cet «arbitrage», et à l’indépendance sujette à caution, s’en sort de plus en plus fragilisée. Ce cercle vicieux, sans conteste, ne fait que des victimes. Le fait que la presse pose, comme toujours — et c’est dans sa nature —  le problème uniquement en terme de liberté n’est plus, non plus, suffisant aujourd’hui. Il y a une prise de conscience collective de la nécessité qu’elle doit faire un chemin sérieux et crédible  vers la formation des journalistes, l’autorégulation, la promotion des exigences déontologiques, la consolidation de son éthique et l’affirmation de son professionnalisme. Mais cela ne règle pas pour autant le problème global. Un secteur vilipendé, haï, méprisé, à qui on fait assumer tout le poids de la crise du politique dans le pays est indubitablement un secteur bouc émissaire. Il faut voir les choses, au-delà de la stigmatisation facile de la presse et des journalistes et plus finement que le mépris institutionnalisé. C’est dans l’environnement économique et juridique qu’il faut aller chercher les réponses. C’est dans le projet de société — s’il existe clairement formulé — qu’il faut aller chercher le statut de la nouvelle presse. C’est dans la vision réelle de la démocratie dans ce pays qu’il faut aller chercher les lignes rouges, jaunes ou vertes, si cette démocratie forme le projet historique de les faire perdurer. L’on voit bien que l’affaire est complexe. Et qu’elle mérite plus qu’un débat. Plus qu’un Forum. Plus qu’une Conférence nationale à l’africaine. Le juridisme, voire le pénalisme, que d’aucuns rêvent de faire valoir encore, et qui a prévalu jusqu’à présent, avec les dégâts que l’on connaît, dans la gestion des affaires  de  presse, n’est plus d’aucun secours. Au contraire, il enfonce notre pays dans les bas-fonds des tableaux des ONG de droits de l’homme et abîme notre image collective tout en dévalorisant nos acquis. Non, la question de la presse mérite, essentiellement, comme les professionnels l’espèrent depuis longtemps, une volonté politique exprimée au plus haut niveau de l’Etat pour trancher une bonne fois pour toutes sur le chemin à prendre. Celui, effectif et réel, de la modernité et du progrès, ou un autre.

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