Editorial

Pas de noirs chez nous

Il est maintenant établi que sans la maîtrise des frontières algériennes, le flux des immigrants subsahariens sur le Maroc ne peut être contrôlé. Seule une démarche régionale commune, sérieuse et constructive peut aider à trouver une solution à ce grave problème. Or, en l’état actuel des relations maroco-algériennes, il est peu probable qu’une véritable coopération s’installe sur ce sujet. L’Algérie se considérant comme une simple voie de transit, ne voit aucun inconvénient à ce que le Maroc, le véritable destinataire de ces flux, s’embourbe dans une situation humanitaire extrêmement difficile qui ruine son image.
En fait, tous les protagonistes dans cette triste affaire sont de mauvaise foi. L’Espagne elle-même qui refuse de saisir la réalité profonde et complexe de ce flux migratoire croit qu’en stigmatisant le Maroc, en élevant des murailles ou en revendiquant mollement un traitement correct aux gens qu’elle expulse, elle s’exonère moralement de ses responsabilités face à ce drame humain. C’est à la fois hypocrite et amoral. Recroquevillée sur deux enclaves coloniales ridicules, l’Espagne se ridiculise et ridiculise avec elle toute l’Europe. Elle fait un commerce sordide avec le sang africain pour une souveraineté improbable sur des confettis coloniaux, en fait des villes marocaines occupées.
L’Union européenne, quant à elle, veut simplement transformer le Maroc en gendarme de l’Europe. Si la sanctuarisation de l’espace Schengen passe par l’édification dans des pays tiers de « réserves humaines » où l’on parque les migrants sans aucun espoir ni de retour ni d’admission, cela ne pose aucun problème éthique ou moral aux technocrates de Bruxelles. Ils sont même prêts à payer un peu pour se donner bonne conscience. C’est tout simplement ignoble.
Mais le vrai naufrage dans cette affaire est celui des droits de l’hommistes blancs et de leur excroissance indigne et honteuse dans les médias. Leurs sanglots sélectifs font pleurer dans les chaumières à l’heure du 20 heures. Les gentils et les méchants sont clairement et caricaturalement distingués et on ne donne aucun moyen aux téléspectateurs occidentaux de comprendre la complexité de ce drame et les responsabilités qu’il implique. Le postulat de départ c’est « Pas de blacks chez nous ». Donc muraille, coup de feu, expulsion etc. Ensuite, on se lamente sur le sort que l’on a fait à ces hommes bannis. Attention nous disent-ils, il faut qu’ils soient traités humainement et avec dignité.
L’hypocrisie de l’homme blanc dans toute sa splendeur. Il n’a rien appris de son histoire : ni massacres coloniaux ni pogroms en tout genre ni solution finale. Rien ne lui parle. Il refait les mêmes erreurs avec la même arrogance et la même suffisance criminelles. Une posture amorale qui, cycliquement, lui fait croire que sa conscience est supérieure alors qu’en fait ce n’est qu’une supercherie morale supplémentaire.

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