Culture

Femmes seules : Une vie pas facile

© D.R

Il fut un temps où les femmes vivant seules étaient mal vues. A Casablanca, des milliers de femmes vivent seules. Nous en avons rencontré quelques-unes dans la rue ou sur leurs lieux de travail.
Nawal, 28 ans, vit seule dans un studio au centre-ville. Elle est originaire de Tétouan et travaille, depuis une année, comme employée dans une agence bancaire à Casablanca. «J’ai souffert avant de dénicher cette garçonnière. Etre célibataire et vivre seule n’inspirent pas toujours confiance; les gens se méfient», déclare-t-elle.
Nawal entretient avec ses collègues de bonnes relations  professionnelles, mais, nous dit-elle, «ils sont prévenants et  gentils, c’est pourquoi j’ai tenu à habiter tout près de mon lieu de travail. Je me sens ainsi plus en sécurité», ajoute-t-elle. 
Nawal a toujours aimé Casablanca et trouve que les Casablancais sont gentils. Mais avec son accent nordique qu’elle n’arrive pas à camoufler, ces derniers la considèrent presque comme une étrangère : «il m’arrive d’éviter de parler pour ne pas attirer l’attention ; ce n’est pas que les gens me rejettent,  mais c’est le contraire, ils veulent m’aider,  me prendre parfois en charge», affirme-t-elle avec beaucoup d’allant .
Le soir, quand Nawal rentre chez-elle , elle est se sent tellement fatiguée qu’elle se voit obligée de refuser  poliment l’invitation de sa voisine, une gentille dame, dit-elle,  à prendre un verre de thé avec elle. Alors découlent de ce refus  un tas d’hypothèses : «Les uns se demandent, explique-t-elle,  ce que je cache, ce qu’est mon mystère ; les autres en tirent la conclusion  que je dois être de mauvaise foi, du fait que je vis seule, d’autres inventent un tas de scénarios aussi amusants les uns que les autres». Entre autres, certains disent qu’elle aurait fui son mari, renié ses enfants, souffert le martyre avec son ex-époux avant de changer de lieu de résidence. Fatima Zohra est une autre femme célibataire qui vit seule à Casablanca. Agée de 35 ans, elle travaille comme ingénieur-informaticienne dans une société de télécommunications. Elle a dû faire maintes tentatives infructueuses avant de trouver un logement à Mers Sultan. Elle est toujours dynamique et se distingue par sa forte personnalité. Elle a le sentiment d’être condamnée à rester seule sa vie durant. Pour elle, c’est très dur lorsqu’on est femme : «Je dois supporter beaucoup de choses, entre autres les mauvais tours du concierge de l’immeuble. Je me fais souvent avoir par lui. Il est derrière les coupures d’eau que j’endure de temps en temps. Je dois lui glisser chaque fois que je le rencontre un billet de vingt dirhams pour éviter l’irréparable», nous confie-t-elle.
Nous nous sommes rendus dans le centre-ville où habitent généralement les femmes célibataires. Nous avons rencontré Hassan, 30 ans, gérant d’un immeuble sis à la rue Omar Slaoui. La plupart des appartements de cette résidence sont des garçonnières louées par de jeunes filles qui viennent  d’autres régions. «Je ne loue pas aux jeunes célibataires  issus de Casablanca. Pourquoi ? Tout simplement parce que je ne voudrai pas voir cet immeuble se transformer en maison close ou en quelque chose de similaire», précise Hassan avant d’ajouter : «Nous  avons une bonne réputation que nous comptons maintenir. Il nous arrive  de faire des mécontents, mais c’est la tranquillité de nos  locataires qui prime», insiste-t-il.
Nous sommes rendus au foyer de jeunes filles à Mers Sultan où nous avons rencontré Hajja Khadija.  Elle gère  elle-même un immeuble qu’elle a hérité de son père. Le prix de location de la chambre varie entre 1.200 et 2000 dirhams, suivant l’espace et le nombre de filles qui se partagent la pièce. 
Hajja Khadija est connue pour la rigueur dont elle fait montre dans le choix de ses locataires. «Toute fille désirant habiter le foyer  doit d’abord me fournir une copie de sa carte d’identité (CIN).  Ensuite, elle doit justifier sa présence à Casablanca, soit par une attestation d’inscription dans une  école, une faculté ou un institut, soit une attestation de stage ou un document prouvant qu’elle travaille de manière régulière et officielle  dans l’une ou l’autre des entreprises de la ville», précise-t-elle. 
Hors ces conditions «draconiennes», il n’y a pas de salut. Hajja Khadija conseille aux femmes vivant seules d’avoir du caractère pour parvenir à faire face aux aléas de la vie:  «Vous savez, il s’agit de Casablanca ; il faut être forte pour y vivre et y travailler», conclut-elle avec paternalisme. Or, la plupart de ses locatrices avouent être démunies devant la solitude. Elles disent qu’elle leur pèse énormément et qu’elle est fort difficile à supporter.

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