Société

Un pamphlet contre les femmes

© D.R

"Les femmes sont des suppôts de Satan". Tel est le titre du dernier livre écrit en 2005 par un jeune enseignant de Tétouan, Mohcine Ennadoui. Cet ouvrage se veut une "vision critique de la réalité de la femme marocaine contemporaine" en prenant comme modèle le code de la famille marocain. L’auteur est licencié de l’Institut islamique de Tétouan et directeur d’un magazine bimensuel, "Chababouna", dans cette même ville du nord du Maroc.
En fait, l’auteur, à peine âgé de 31 ans, dresse le profil de la femme musulmane idéale. Il va sans dire que toutes les qualités du monde sont citées par l’auteur pour définir cette musulmane idéale. Cette dernière doit refuser toute promiscuité avec l’homme et rejeter les splendeurs de la civilisation occidentale matérialiste. S’appuyant sur des Hadiths dont l’authentification est assez faible, Mohcine Ennadoui sombre dans un inventaire d’une multitude de citations privant ainsi l’ouvrage de toute profondeur et de pertinence. Mais le meilleur est à venir.
L’auteur inscrit dans la deuxième catégorie les femmes non-voilées, qui exhibent leur beauté et attisent le désir des hommes. "Nous vivons dans une époque médiocre où ce type de femmes sont majoritaires. Des femmes habillées et dévêtues à la fois, leurs poitrines et leurs cuisses nues, leurs vêtements sont serrés et transparents… elles sont de véritables terroristes à la solde de Satan, des ennemies de Dieu qui trompent leurs maris et détruisent les foyers", voilà le portrait-robot de la femme que combat Mohcine Ennadoui.
Il se déchaîne : "Elles sont les ambassadrices de l’Occident laïque. Ces femmes rampent comme des vipères pour défendre les droits de Satan, sous prétexte de l’égalité entre les hommes et les femmes dans l’héritage et dans l’âge du mariage…".
Entre ces deux catégories de femmes, il y en a une troisième: les indécises. Ces dernières ne font pas leur prière de manière régulière ou à temps. Elles voyagent seules. Leurs habits ne couvrent pas tout le corps, "et même si elles sont voilées, leur hijab attire les regards et découvre les parties les plus suggestives de leurs corps". Ces femmes ressemblent, selon Mohcine Ennadoui, à de véritables "hypocrites".
Dans une déclaration à ALM, Mohcine Ennadoui, affirme que "nous sommes aujourd’hui en période de transition démocratique. Il faut écouter l’avis et l’avis contraire. Si certains critiquent mon livre, d’autres en revanche m’ont félicité. A cet effet, je tiens à préciser que j’éprouve un énorme respect pour les femmes. Toutefois, force est de constater que la plupart des femmes dans la société marocaine connaissent aujourd’hui une dépravation dangereuse".
Mohcine Ennadoui estime que cette dernière catégorie ne mérite aucun respect et que le seul et unique comportement que l’on devrait avoir à son égard c’est la critique.
Pour sa part, l’universitaire Mohamed Moatassim, professeur de droit musulman à l’Université Mohammed V de Rabat, a déclaré que "c’est par hasard, en flânant devant certaines librairies aux portes de la médina de Rabat" qu’il a découvert l’ouvrage de Mohcine Ennadoui. "En feuilletant ce livre, assure le Pr. Mohamed Moatassim, je fus tout simplement pris de vertige. En trente années d’enseignement d’un cours sur le "Droit musulman", il est donc "suffisamment qualifié dans un domaine aussi vaste et complexe que l’Islamologie pour interpréter certains versets coraniques ou attribuer au prophète Sidna Mohammed ou à ses califes des sentences de mépris, d’exclusion et d’humiliation à l’encontre de la femme ou de l’homme". le Pr. Moatassim qualifie Mohcine Ennadoui "d’exégète venu d’une autre planète". Le professeur remarque aussi, "qu’à aucun moment, l’auteur ne cite les versets coraniques qui magnifient la femme et la protègent. Dans sourate «Annissae», il ne cite que ce qui satisfait sa haine de la femme, ignorant que dans le Coran il n’y a point de sourate «Arrijal» (les hommes). Il oublie que sa mère n’est autre qu’une femme et que le paradis se trouve sous les pieds des mamans". Enfin, le professeur Mohamed Moatassim appelle "les organisations féminines marocaines et les démocrates de notre pays à faire leur devoir pour que plus jamais de pareils ouvrages, faits de surcroît sous couvert de l’Islam, incitant à la haine, le mépris et la discrimination à l’égard de la femme, ne soient édités ou publiés et laissés à la portée de notre jeunesse".

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